Isla Más a Tierra ou le refuge de Robinson Crusoé
L’archipel volcanique
L’île Robinson Crusoé se nommait avant son nouveau baptême en 1966, Isla Más a Tierra, « Plus prêt de la terre »… Ce relief volcanique, éloigné des côtes du Chili de six cent soixante-quatorze kilomètres, baignant dans le Pacifique sud, est la plus grande île de l’archipel Juan Fernandez.
C’est le navigateur espagnol Juan Fernandez qui découvrit l’archipel en 1574, en quête d’une nouvelle route vers le Chili et qui lui donna son nom. Il nomma notre île Santa Cecilia qui deviendra par la suite Más a Tierra. L’île Robinson Crusoé n’a pas l’image paradisiaque des îles du Pacifique, des reliefs tourmentés et des falaises à pic tombant dans la mer n’en font pas un lieu à l’abord aisé. Son seul accès aujourd’hui peut se faire en bateau, en accostant au port du village de San Juan Bautista. Ce hameau de pêcheurs de langoustes abrite en tout et pour tout moins de six cent âmes à l’année. Pourtant, cette île à l’aspect peu engageant, a souvent été montrée du doigt de par les siècles, lieu de résidence forcée d’un certain Alexander Selkirk au XVIIIe siècle, coffre-fort de pirates, puis scène d’une extraordinaire chasse aux trésors en 2005. Mais commençons par le commencement…
L’île aux naufragés
A l’aube du XVIIIe siècle, un jeune marin écossais de vingt-huit ans est amené en canot, sur l’île Más a Tierra. Pour bagages, il n’emporte avec lui que le strict nécessaire vital, quelques vêtements, un matelas, un fusil à pierre et des munitions, une poignée d’outils, une marmite, plusieurs livres dont une bible et du tabac. Son nom, Alexander Selkirk, maître d’équipage du navire Cinque Ports en conflit avec son capitaine Thomas Stradling ; pour Selkirk, le navire n’est plus en état de naviguer. Alexander, pour sauver sa vie, demande à être débarqué sur l’île. Selkirk voit en cette année 1704 repartir son navire l’abandonnant ainsi, naufragé volontaire sur une terre à l’apparence hostile. Mais Alexander n’est pas dépourvu de ressources, il aménage deux abris où il s’installe et vivra pendant quatre ans et quatre mois des richesses de l’île. Cette dernière n’en manque pas, chèvres sauvages, poissons, œufs de tortues et langoustes constitueront son quotidien. Il s’installe également dans une grotte sur les hauteurs de l’île. Même si la faune ne manque pas, de nombreux chats abandonnés sur l’île pour lutter contre les rats, Alexander souffre d’une solitude étouffante. Cette dernière est interrompue en 1708, un navire, le Duke commandé par le capitaine Woodes Rogers, accoste sur l’île et le naufragé volontaire est sauvé. Selkirk est dans un état pitoyable, vêtu de peaux de chèvres et ne parlant plus l’anglais.
Il apprendra plus tard, qu’après son départ de Más a Tierra, le Cinque Ports fit naufrage au large des côtes péruviennes et il n’y eu que huit survivants, capturés par les Espagnols…
En 1711, Alexander Selkirk débarque à Londres, il écrira le récit de ses aventures « Récit de la manière dont Alexandre Selkirk vécut quatre ans et quatre mois seul sur une île », puis se maria deux fois avant de mourir en 1723 à l’âge de quarante-sept ans.
Le récit de Selkirk obtient un succès d’estime, un écrivain, Daniel Defoe s’inspire de son histoire pour rédiger le roman « Robinson Crusoé » en 1719. Ce denier connaîtra le succès que l’on sait.
Pourtant Selkirk ne fut pas le seul « Robinson » de l’archipel Juan Fernandez, d’autres hommes vécurent en solitaire sur ces reliefs arides, rescapés de naufrages ou ermites volontaires. … La suite dans Monnaies & détections n° 81